ORIGINE DU DÉCOUPAGE DE LA GUINÉE EN QUATRE RÉGIONS OU LA QUADRIPARTITION DE LA GUINÉE EN 1905.

ORIGINE DU DÉCOUPAGE DE LA GUINÉE EN QUATRE RÉGIONS OU LA QUADRIPARTITION DE LA GUINÉE EN 1905.

L’arrêté du 18 mai 1905 fixant la division administrative de la Guinée présente la première version officielle : il regroupe les cercles en six catégories : Basse Guinée (Mellacorée, Dubréka, Rio Pongo, Rio Nunez) ; Labé (Labé, Touba, Yambéring) ; Fouta-Djalon (Timbo, Ditinn, Dinguiraye) ; Haute-Guinée (Kouroussa, Kankan, Siguiri) ; Haut-Niger (Beyla, Kissidougou) et « cercles indépendants », véritable fourre-tout car ils ne sont pas contigus (Kindia, les Coniaguis, les Timbis, Faranah) (Journal officiel de la Guinée, 1905). Arcin (1907) raisonne de la même manière car il s’aligne sur l’arrêté cité. À ce stade, les éléments de la classification reposent sur la géographie (altitude ou fleuve : Basse-Guinée, Haut-Niger) ou des entités politiques (Fouta-Djalon, Labé) ou culturelles (les Coniaguis. Peuple qui se distingua par sa résistance prolongée…). Peu à peu, le système de classification se raffine et se complète. Le critère le plus fréquent renvoie aux écosystèmes, mais les auteurs hésitent entre bi-, tri- et finalement quadripartition.

Les implications politico-administratives de la division primaient au début sur les critères naturels : ceux-ci ne constituent d’ailleurs pas le critère unique ou dominant comme le montre la terminologie. On retrouve là la démarche de Vidal de La Blache : « La caractéristique d’une contrée est ainsi une chose complexe, qui résulte de l’ensemble d’un grand nombre de traits et de la façon dont ils se combinent et se modifient les uns les autres. Atlas général, préface, Paris, Armand Colin,…. » Les mots employés pour désigner les régions mêlent des éléments liés à l’altitude et la géographie (Basse, Haute et plus tard Moyenne), à la localisation (maritime), à la végétation (forestière) ou à un référent politique (Fouta-Djalon). Un parallèle peut être tracé avec le système de nomination des départements français. Décrivant les « grandes régions naturelles » de la Guinée, Fernand Rouget, archiviste au ministère des Colonies, note en 1906 :

« La Guinée française est partagée en deux zônes bien distinctes :

I Le pays soussou. Il s’agit d’une zone côtière, qualifiée ici par sa…, c’est-à-dire les bassins des fleuves côtiers du Rio Nunez à la Kolenté ou Grande Scarcie ;

II Le Fouta-Djallon, régions de montagnes et de plateaux .Fernand Rouget, La Guinée, notice publiée pour l’Exposition…. »

Il rattache à ce dernier tout le reste de la Guinée. L’opposition entre la côte et l’intérieur est un mode de catégorisation fréquemment utilisé par les Européens. La configuration en croissant du territoire guinéen se prêtait toutefois mal à cette grossière dichotomie.

En 1922, une notice officielle décrit ainsi la Guinée : « Trois grandes régions naturelles la constituent : la région côtière ou Basse-Guinée, la région centrale ou Moyenne-Guinée, la région nigérienne ou Haute-Guinée . La Guinée, notice publiée pour l’Exposition coloniale…. » Cette dernière se présente de manière vague, car on lui rattache la partie sud-est de la colonie tout en notant les particularités autant géographiques que climatiques. La conquête militaire des hauts plateaux orientaux par des troupes venant du Soudan et non de la côte, le contrôle tardif et difficile de l’extrême sud-est, la moindre connaissance de cette zone éloignée de Conakry expliquent la différentiation tardive de ces deux régions et donc l’hésitation entre trois et quatre régions. Ceci est clairement énoncé dans un document de 1924 : « La Haute-Guinée comprend deux régions très distinctes : la zone soudanienne et la zone forestière. La Guinée française en 1924, supplément illustré…. » La reconnaissance séparée de ces deux sous-régions internes, produit de la nature tout autant que de l’histoire lointaine et récente. On peut signaler l’empire de Samori Touré (années 1860-1890)…, permet d’aboutir au nombre de quatre.

La quadripartition s’impose au cours des années 1920 et devient le stéréotype de la Guinée, tel que le développe la description minutieuse adoptée pour l’Exposition de 1929 qui conclut :

« Enfin, par suite des frontières sinueuses de la colonie, la partie de la Guinée qui touche au Libéria, et qui constitue une région distincte, est très montagneuse : sur son versant sud, elle est couverte de forêts qui, d’ailleurs, ne ressemblent que de loin à la grande forêt de la Côte d’Ivoire ; néanmoins on la dénomme région forestière. La Guinée française, Paris, Gouvernement général…. »

Le texte lie à chaque fois une région et un relief, tout en soulignant la diversité interne. L’exercice des comparaisons entre régions guinéennes ou entre la Guinée et les autres colonies, en l’occurrence la sylvestre Côte d’Ivoire, est instructif. Finalement, la mention des « frontières sinueuses » met en évidence la complexité du découpage. De fait, on trouve souvent l’expression région « dite forestière ».

Lors de l’Exposition coloniale internationale de Paris en 1931, la division en quatre régions de la Guinée est présentée comme allant de soi. La Guinée, notice publiée pour l’Exposition coloniale…. Ce découpage devint alors la norme. La catégorisation est forcément taillée à grands coups de serpe : bien téméraire serait celui qui défendrait l’évidence naturelle des limites entre régions sur le terrain. Par ailleurs, pour compléter le tableau, d’autres éléments de caractérisation vinrent se greffer sur les critères de la géographie physique et de la climatologie, sur un mode tout aussi réducteur. Le trait est ainsi renforcé, en cherchant à faire coïncider le découpage régional et un peuple, ce qui s’avère toutefois plus ardu.

Source:
Journal officiel de la Guinée du 1er juillet 1905.

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